Toujours vaillants!


La rame, composée d'une remorque encadrée par deux autorails, stationne à Besançon-Viotte.

Ca y est! Et oui, j'ai réussi à les surprendre, eux qui se cachaient depuis des semaines. Eux? Les X2800 bien sûr! Je vous en avais déjà parlé, il s'agit des plus vieux autorails à voie normale encore en service commercial en France. Il n'en reste que 4, dont deux qui roulent effectivement; le meilleur étant qu'ils ont eu la bonne idée de loger à Besançon-Viotte. (qui a dit que j'avais choisi Besançon pour ça? :p)
Ce sont des autorails mythiques dans le milieu ferroviaire, car ils sont l'incarnation de ce que beaucoup considèrent comme le "vrai" chemin de fer. Pour ma part, c'est en tant que "papys du rail" qu'ils m'intéressaient, mais aussi pour leur moteur, dont le bruit est extrêmement réputé. Je voulais juger par moi-même avant qu'ils ne finissent à la casse, ou mieux dans les mains d'une association. Il s'agit d'un moteur MGO, construit par ce qui deviendra plus tard Alstom: la Société Alsacienne de Construction Mécanique. A vrai dire, je ne savais pas trop à quoi m'attendre: j'avais bien vu des vidéos sur Internet, mais le son n'était pas terrible. Quand je suis arrivé à la gare, et surtout quand j'ai pris place à bord, j'ai compris pourquoi il existait un tel engouement pour ce moteur. Ca change vraiment de ce qui existe sur les engins actuels, qui ont un moteur de camion banal et qui n'a pas de sonorité caractéristique. Celui-là gronde gravement et donne une impression de puissance assez curieuse. Mais c'est quand on grimpe ou qu'on démarre que l'on sent toute la différence, le changement de sonorité à mesure que le mécanicien commande à l'autorail d'accélérer m'a impressionné. Dans les tunnels, le bruit amplifié donne une autre mesure au voyage.
En fait, les 2800 étaient des autorails très puissants à leur sortie, bien plus que les engins poussifs que possédaient alors la SNCF, il y a déjà 50 ans de ça. Ils étaient de conception robuste et s'affranchissaient sans problème des fortes rampes des lignes de montagne, même attelés à des remorques, avec ou sans l'aide d'un de leurs camarades. Ils ont donc été particulièrement présent dans le Massif Central, et leur couleur leur a valu le surnom de "bleus d'Auvergne", ou "bleus" tout simplement. Ils ont circulé sur bon nombre de lignes secondaires aujourd'hui fermées, assurant la desserte de nombreuses gares, de la plus petite à la plus grande. Leur exceptionnelle durée de vie (en 2006, 41 engins sur les 119 construits étaient encore à l'inventaire de la SNCF) témoigne de la qualité de ces autorails et participe également à leur prestige. Rarement un autorail, par définition dédié aux petites lignes, vivant toujours dans l'ombre de ses imposantes sœurs les locomotives, n'aura suscité autant d'intérêt. Pour un non ferrovipathe, évidemment que ce sont aujourd'hui de vieux tromblons, sans clim, peu engageant d'aspect et un peu rouillés. Mais pas tant que ça, finalement, puisque même la jeune contrôleuse me disait que les clients appréciaient toujours ce genre de matériel. Et ces vieux tromblons n'ont pas encore dit leur dernier mot... ;)

Bien qu'un peu désuet, l'intérieur des 2800 n'en reste pas moins tout à fait correct, d'autant qu'ils sont apparemment très bien entretenus. A vrai dire, j'ai même été surpris par le confort de la rame: malgré le relief accidenté de la ligne, c'était tout à fait agréable de prendre place sur ces sièges. Ils ont du en voir passer, des gens, en 50 ans!

Quand je me suis rendu à la gare jeudi dernier, je n'avais pas beaucoup d'espoir de les voir, et je ne m'étais donc pas pressé plus que ça... Quand je suis arrivé, le bruit était différent de celui auquel j'avais eu droit les jeudis précédents. J'ai donc accéléré le pas dans le souterrain, et à ma grande joie j'ai aperçu un bout de leur caisse par l'escalier. Ni une, ni deux, j'ai sauté en tête sans prendre le temps de composter. Comme j'avais bien fait d'acheter mon billet longtemps à l'avance! Il était 12h24 et 40 secondes, le départ fut donné pile à l'heure 20 secondes plus tard... Je me suis présenté à la contrôleuse en lui expliquant la situation, et je me suis installé dans mon siège pour profiter du voyage. Oh, ça n'avait rien d'une croisière transatlantique: le train effectue un aller-retour pour Le Valdahon, petite commune de 4000 habitants située à 40 minutes de Besançon par le rail. Mais bon, pour 6€, mon petit TER brinquebalant au milieu des paysages enneigés valait bien le Queen Mary 2. Car oui, j'ai adoré. C'est peut-être bête, mais je n'y peux rien. Comme devant un bon film, j'ai savouré chaque minute du parcours; c'est quelque-chose qu'on oublie souvent de faire: regarder simplement par la vitre et apprécier. En tous cas, moi, ça m'a mis de très bonne humeur, et j'étais presque triste d'arriver au terminus...

Je tiens à remercier une fois encore Gilbert, sans qui je n'aurais jamais su les horaires des éventuelles circulations, ainsi que le personnel SNCF de la rame, qui m'a très bien accueilli!

Ca y est, c'est terminé pour aujourd'hui: tandis que Sieur TGV s'éclipse sur sa voie de garage en observant d'un œil étonné ses aïeuls, nos vaillants quincagénaires regagnent leur dépôt pour un repos bien mérité...

Vous trouverez ma vidéo de leur départ pour le dépôt ici, et d'autres qui ne sont pas de moi mais qui permettent d'entendre correctement le MGO ici et .

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