Nouveau petit texte!


Sur l'ancienne ligne Grenoble-Chambéry, le carré violet n°6, aujourd'hui disparu, guette des trains qui ne viendront plus...

Voici un nouveau texte d'inspiration ferroviaire que je viens de terminer à l'instant. Je ne l'aime pas trop trop, je le relirai un peu plus tard pour corriger deux ou trois trucs. Ca faisait longtemps que je n'en avais pas écrit, mais la lecture de textes très chouettes ici ou là m'a donné envie de recommencer. ;) Bonne lecture, si vous en avez le courage!
[edit] Texte modifié à 19h20.

Réveil.

Il est 4h du matin, sa radio s'allume et commence à annoncer les nouvelles de la journée. Somnolant, il quitte son lit; il serait bien resté couché un peu plus longtemps mais il doit se dépêcher, son train part dans moins d'une heure. Petit-déjeuner, dernières vérifications et la porte se referme sur un immeuble encore endormi. Dehors, le vent sera son seul compagnon, la ville toute entière est silencieuse. Rythmant un flot de voitures invisibles, les feux rouges passent régulièrement au vert. L'ambiance est particulière, il pleut mais il ne fait pas froid et il ne croisera personne jusqu'à la gare. Plongé dans ses pensées, il se demande quel matériel assurera son TER matinal. Il aperçoit bientôt l'horloge de la gare, illuminée sur sa tour. Inquiétude, les distributeurs seront-ils en marche si tôt? Il n'a pas son billet...
Quelques minutes plus tard, il arrive devant les portes du petit hall; elles ne s'ouvrent pas. Pourtant, à l'intérieur, tout est allumé et le grand panneau indique déjà les trains au départ. Quelques personnes attendent avec lui, d'après les horaires le bâtiment devrait déjà être ouvert. Il ne reste que dix minutes avant le départ quand un agent vient ouvrir aux futurs passagers. Sur chacune des machines automatiques, une lumière rouge signale qu'elles ne fonctionnent pas. Il commence à se demander s'il pourra partir et s'il a bien fait de se lever si tôt. Mais au fond du bâtiment, une machine isolée porte la petite lueur verte salvatrice. Soulagé, il s'en approche et c'est avec une lenteur extrême qu'elle daigne lui délivrer son billet. Regard furtif vers le tableau d'affichage, voie C. Sur le quai, il n'y a déjà plus personne; le train est très long, ça l'étonne: malgré la pluie, il se dirige vers la queue du train. Aujourd'hui, la locomotive est en pousse, et il aimerait bien savoir de quel modèle il s'agit. Son nez est arrondi, ses persiennes horizontales et elle semble un peu haute sur ses grandes roues: c'est une BB25200. Ruisselante, elle brille des reflets orangés de l'éclairage et ronronne tranquillement. Plus loin, les signaux scintillent: rouge, vertes, violettes, les ampoules ne sont plus que de petits points colorés. Les rails humides luisent dans la noirceur du ballast puis disparaissent avec la nuit, au bout des quais. La scène n'a rien d'extraordinaire, et pourtant, elle lui réchauffe le cœur. C'est un peu bête, se dit-il en montant dans la dernière voiture, juste devant la locomotive. Il est seul, les autres voyageurs ont dû monter dans les voitures de tête. Quelques instants après, la rame s'ébranle et le convoi quitte Besançon à faible allure. Par la fenêtre, les lumières de la ville défilent tranquillement, puis se font petit à petit de plus en plus éparses. Il ne reste bientôt plus qu'un noir profond en guise de paysage; le train tout entier semble happé par l'obscurité.
A moitié endormi, il observe l'incessant ballet des rideaux de sa voiture. Ils semblent danser, se levant et se reposant sans un bruit, accompagnant la marche du train. La ligne fait de nombreuses boucles pour desservir un maximum de villages et il fait toujours nuit noire quand le TER stoppe dans les petites gares du parcours; beaucoup trop long il dépasse souvent du quai. Les vieux panneaux défilent à chaque redémarrage, leurs lettres bleues défraîchies éclairées par des néons blafards. Les bâtiments ferroviaires sont décrépis, murés et font peine à voir. Ils semblent avoir été oubliés là depuis longtemps, sans que personne ne sache plus trop pourquoi on les a construit. Sous les abris, de simples feuilles de papier humides sont placardées en guise d'horaires. Il se prend à imaginer les anciens chefs de gare, casquette aux lettres dorées fixée sur la tête et sifflet à la bouche, surveillant leurs montres. Il s'imagine les panaches de fumée d'une locomotive à vapeur arrivant à quai et entrevoit l'agitation lors du passage de l'omnibus du soir. Des visions furtives vite englouties par les ténèbres...
Après deux heures et demie de trajet, le train arrive en gare de Lyon-Part-Dieu avec le jour. Il quitte le confort de son fauteuil, oublie ses rêves et s'apprête à attendre plus d'une heure sa correspondance. Il choisit un quai au hasard, s'assied sur un banc et observe les innombrables voies de la gare: il est encore tôt et il n'y a pas grand-monde, peu de quais sont occupés. Quelques minutes plus tard, avec un soufflement caractéristique, la locomotive emporte le convoi qu'il vient de quitter vers Lyon-Perrache. Doucement, progressivement, le mécanicien fait accélérer la rame, qui disparaît bientôt dans une courbe. Sur une potence, deux ampoules rouges cèdent leur place à une verte: voie libre, la journée peut commencer...

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